Porc ou pas porc?

Terrasse,regards, prétexte, questions, observation, compliments, points communs, « donnez-moi votre numéro si vous voulez, je connais du monde dans votre milieu, ça pourrait vous aider ». Pourquoi souvent le @groslourd (qui n’est pas nécessairement un @grosporc) veut-il jouer sur l’entremise de la profession pour tenter de vous harponner? Sans doute parce qu’à la question « vous faites quoi dans la vie? », tout le monde répond par son boulot (sauf les dealers, sauf les call girls, sauf les huissiers, sauf les mères au foyer c’te honte*!). Sans doute parce que le mec pense qu’il vous « tient » possiblement par là. Sans doute parce qu’une faible femme est programmée, selon lui, pour utiliser son aura séduction comme monnaie d’échange dans le domaine professionnel. En même temps, il est évident qu’il est plus aisé d’être attirant, sûr de soi et souriant qu’affreux, sale et méchant pour réussir. Pour qui que ce soit. Dans quelque contexte que ce soit. Mais, alors, pourquoi certaines finissent avec une main sur le nichon, alors qu’elles avaient pourtant déjà un soutien-gorge pour le soutenir, merci. Pendant que d’autres se baladent peinard et bandent quand ils ont envie de bander?

Il y a plusieurs années, alors que je ne connaissais pas encore le concept de « frotteur » de métro, j’avais croisé la route de la Che Guevara de la minijupe. Attrapant une main baladeuse sur le vif de son collant opaque, elle avait vilipendé un malheureux d’un exceptionnel« A qui est cette main? Quelqu’un a perdu sa main! Rassurez-vous, je l’ai retrouvée, elle était sur mes fesses», en agitant sa prise comme une serviette de Patrick Sebastien. C’était évidemment grandiose et toutes les nanas qui flippent de rencontrer Emile Louis dans le RER A pourraient saluer sa bravoure.

Mais face à un comportement inopportun (je reste étonnamment polie), il est bien plus fréquent de se remettre soi-même en question en interrogeant sa propre attitude: j’ai dû en jouer, je n’ai pas été assez claire, j’ai dû l’inciter sans le vouloir, je dois mal comprendre. Voilà le lot commun de nos réactions!

Alors qu’on dilue le débat entre sexisme, harcèlement, bonnes blagues girondines-c’est bon-on peut plus rien dire et autres « qu’est-ce que tu veux, ça changera pas », voilà donc qu’on vient de nous pondre un nouveau concept. Celui de « zone grise », qui correspond au moment de flottement où la nana se demande si elle hallucine, ou si ce serait pas ça justement du harcèlement. Donc oui, c’est bien ça. Et oui, le Monsieur appuie bien volontairement son sexe contre toi dans le métro.

Comme Madame Meuf n’aime pas que tu restes dans le flou, elle t’a prévu un mémo ultra simple pour distinguer séduction et agression. A destination des hommes et des femmes.

Le concept principal pour vous Messieurs: il n’y a qu’un oui qui veuille dire oui!

Prenons l’exemple de cette élégante citation trouvée sur twitter à l’appel du #BalanceTonPorc:

« Tu as de gros seins. Tu es mon type de femme. Je vais te faire jouir toute la nuit ».

Eh bien contre toute attente, cela peut être considéré comme de la séduction, si la Madame est contente quand tu lui dis ça. Car, oui, nous sommes en mesure d’apprécier un peu de rugosité dans les propos, à condition d’avoir envie qu’on nous dise qu’on est bonne. C’est un peu sur le principe de recevoir un selfie de bite d’un contact Tinder. Même si la vision d’un sexe turgescent en plein repas chez mémé peut surprendre, il est dans les conditions générales de vente de Tinder que tu n’étais pas là pour vendre des cravates, si ce n’est de notaire.

En réalité cela n’est pas très compliqué pour toi garçon : si tu as un grand oui d’approbation, go, vas-y, balance des photos, des messages, du fantasme, du plaquage contre le mur. En cas de consentement, il n’est pas rare d’ailleurs que la meuf apprécie un petit harcèlement WhatsApp, qui sera lu comme une marque de désir.

Par contre si c’est bof, rien, ou non, tu seras chou de passer ton chemin, sous peine de te retrouver hashtagué au croc de la charcutière ou le saucisson coupé en rondelles. 

Aussi macho ou queutard qu’il puisse être, saluons la leçon de vie et de sagesse que Francky Vincent peut nous diffuser via cette vidéo de meufs à poil:

Il a la bienséance de ne proposer son zizi qu’à celles qui en veulent (et c’est bien aimable à lui). Ce n’est hélas pas le cas de tous. Toi qui ne sais plus trop ce que tu peux dire ou faire, tu noteras dans cette chanson entraînante que les dames disent « oui, oui, oui, oui» (sans être menacées par un cran d’arrêt ou qu’on leur propose un CDI). Donc, a priori, la meuf est opé, tu peux y aller.

Le concept principal pour vous Mesdames: ce n’est pas de votre faute !

Souvent confuses par tant d’amalgames et d’interrogations, une règle majeure et nécessaire à destination des femmes: ce n’est pas de votre faute bordel! C’est notre statut de femme qui servira toujours à excuser de nous en foutre plein la gueule, et pas que du sperme ou des baffes. Tu es grosse? Non tu es une meuf grosse, nuance. Tu es donc coupable de te laisser aller et de ne pas être désirable. Tu es sexy? Perdu, te voilà coupable d'être aguicheuse et de miser sur le sexe pour réussir. Tu es une femme de pouvoir? Tu es pire qu’un homme, dure et insensible. Et, en même temps, tu n’as pas bien le choix puisque, pour forcer le respect qu’on ne te donne pas d’office, du fait de ton statut de meuf, tu dois être plus stricte. C'est le fait même d'être une femme qui empire ton cas. A posture équivalente, les mecs sont justes gros, élégants ou successfull…

Donc stop. Ce n’est pas parce que tu es sexy, court vêtue, avenante, gentille ou douce que tu te fais emmerder. C’est parce que tu es une meuf. Alors que mes parents m’interdisaient de sortir sous prétexte que je n’étais pas un cageot et que j’allais m’attirer des emmerdes, je tiens à rassurer les parents de filles moches: elles aussi, petites veinardes, elles peuvent très bien se faire violer.

#MeToo (et non #Mytho hélas...)

Allez, juste pour le sport, je vous raconte vite fait mes #MeToo. Des agressions sexuelles, dieu merci, aucune. Mais des gros porcs oui, un beau ramassis. En vrac, j’ai eu droit à des photos de moi prises à mon insu par un mec qui me suivait pendant des semaines; des dessins de moi en mode manga bondage; des très vieux qui me faisaient des réflexions salaces sur ma posture ou mon supposé appétit sexuel à la fontaine à eau; des mixtapes sur l’histoire que le mec se jouait tout seul (finissant par une chouette chanson de menace de mort); des commentaires chaussures-poids-look au boulot; des félicitations sur le nombre de mecs qui m’ont matée dans un événement pro et non sur le boulot fourni et tout autre "tu suces salope" dans la rue (même enceinte, joli fantasme, belle créativité). Si vous vous reconnaissez vous pouvez vous auto-tagger, quoique, ayant toujours attiré les vieux porcs, ils doivent être un peu rôtis maintenant les miens.

Sans vouloir paraître érotomane, j’ai aussi été agressée amoureusement! Par des mecs qui étaient sûrs que nos destins étaient liés, mais que je ne m’en étais pas encore rendu compte. L’une des histoires a fini chez les flics et l’autre avec un faux entretien d’embauche par un pote à lui, qui finissait par me vendre le mec…

En résumé, si on veut se munir d’un mec, c’est gentil, on peut. On peut le mettre dans notre caddie, façon Adopte Un Mec. On a même le droit de se faire traiter de consommatrice, de "comme les mecs" et de chaudasses. Parce qu’on le veut bien. Parce qu’on est con... (wait for it)... sentantes! Et que c'est précisément la sélection que NOUS faisons des hommes qui montre qu'on se respecte. 

J'en profite pour remercier par ailleurs le petit serveur de ce midi, qui m’a offert un café et tout un tas de gâteaux en m’appelant son coeur, parce qu’il était sympa, respectueux, et qu’on avait bien le droit de rigoler. Je remercie parallèlement les parents du petit Quentin de bien vouloir expliquer à leur rejeton de cesser d’embrasser ma fille de force, sans quoi je le perdrai en forêt de Fontainebleau lors de la prochaine sortie scolaire, afin qu’il se fasse des potes de sa catégorie.

Il faut arrêter de se laisser traiter comme une minorité, alors qu’on est plus nombreuses dans le monde nom d'une pipe (qu'on a choisi de faire)! Il faut recruter des hommes féministes! Si notre charme doit être utilisé opportunément, ça peut peut-être servir à ça!

 

* Pour éviter les procès d’intention Madame meuf vous signale qu’elle a exercé la douce profession de mère au foyer-pendant-ce-temps-là-on-cotise-pas, et autant c’était très chouette, autant ça chope pas des masses en soirée comme taf…
 
Just for you, allez tester vos connaissances en harcèlement (perso j'avais faux en tout quasi...). C'est par là.

 

Madame Meuf