C’est la rentrée. Ça fait chier. Part 2
Alors là ça y est, on est dans le dur. Il ne fait peut-être pas encore nuit à 17h et l’été a tenté cinq minutes d’incruste supplémentaires, mais le vent a déjà tourné, ça se sent. C’est-à-dire que tu ne racontes même plus tes vacances, qui sont à l’état de souvenir, tu ne débronzes plus, tu ne pèles plus, non, carrément tu creuses les cernes et les bajoues. C’est officiel, c’est plus grave que prévu, c’est vraiment la rentrée. Tu en viendrais même à regretter les Espagnoles en Desigual et les Teutonnes en Birckenstock argentées qui te causaient du dernier grand roman français qu’elles avaient lu (Musso).
A J10 de crèche ton mioche a déjà la scarlatine, toi ça va pas tarder. T’inquiète, ça passera incognito entre les rides et l’anticernes. C’est ce moment où tu as beau aimer ton gamin, ça te dit vite fait quand même de repasser des journées entières collée à lui en le consolant de loin de peur de finir pleine de pustules/pue à l’œil/Mouche-bébé-aspire-morve dans la bouche. Ah ! Et évidemment, malgré le merveilleux système immunitaire que tout le monde travaille pourtant bien depuis des années en se mettant des plumes de pigeon dans la bouche pour faire l’Indien et en tripotant toutes les toilettes de France, ça morve et ça crache à tout va dans ton pieu en pleine nuit. Ils ont pas dû capter les nouveaux horaires, le changement de climat, la nécessité de mettre sa main devant sa bouche putain !
Si tu es chanceuse comme moi, tu as aussi retrouvé ton psy. Tous les ans c’est la même limonade, il ne t’avait pas manqué, t’avais pu te payer un étoilé Michelin à la place dans l’été, mais tu y retournes quand même, car il ne t’a pas laissé partir comme ça le bougre. Alors, évidemment, lui il te déglingue direct ton débriefe des vacances en te demandant quand tu deviendras une grande personne qui ne s’engueule pas avec sa mère, ne s’engueule pas devant ses enfants et ne s’engueule pas avec la première conne venue dans le train pour la peine. Avec un peu de bol, il t’a dit qu’il fallait repartir à zéro (mais pas sur son compte en banque) en achetant un livre entre Raël et Les Enfoirés, selon lequel tu vas changer les choses avec des bouquets de roses et réinventer quelques petites trentaines d’années d’habitudes dévastatrices, dont tu n’avais évidemment pas conscience, c’est normal tu as occulté, ne me remerciez pas ça fera 100 euros.
D’un coup, la rentrée que tu voulais prendre à la cool sans objectif particulier te revient en pleine tronche et tu l’interprètes comme une grave crise de sens, un questionnement dépressif sans espoir, une incapacité généralisée uniquement due à toi-même (et au temps que tu passes à faire des lessives et des transports en commun aussi). On ne te demande plus « Alors ces vacances ? ». Mais « alors cette rentrée ? » Et ça, ça veut dire quoi ? Ça veut dire: colle toi des objectifs ma vieille !
Te voilà obligée de te mettre au body bum bum pump'n jump, de faire des bilans de compétences, des tarots de Marseille, de réapprendre Photoshop (ça pourra toujours te servir pendant la scarlatine sur Facebook), de faire des surprises à ton mec, de renégocier ton crédit, de lire Crime et châtiment, de faire du vélo TOUS les dimanches avec tes gosses, de faire des milliards de dîners avec des rôtis et pas trop d’alcool, de méditer en pleine conscience vite fait entre midi et deux. Et de te faire engueuler par ton psy parce que tu es hyperactive. Difficile équilibre…
Quant à tes copines, ça va bien merci. Il y a toujours la relou qui arrive à surfer sur les bienfaits de son été reposant et dynamisant comme une pastille Bion spécial senior (ah oui, horreur et damnation, la petite pouffe de la pharmacie m’a dit de prendre senior. Pas pour l’âge hein, pour le ginseng… style…). Tes potes les fourmis, dont les mille projets lancés l’année dernière portent leurs fruits, vont pouvoir vivre leur passion pour la gestion de projets innovants sur tableau Excel et te mettre une pression insidieuse sur ton manque de méthode. Et tes potes les cigales continuent à kiffer sans se demander de quoi demain sera fait (mais comment font elles nom de nom ?!? Un stage, vite un stage !).
Et le boulot? Ben voilà voilà quoi. Soit t'as fait le tour en huit jours, soit t'as la flemme de t'y mettre, soit tu croules sous la tâche mais tu préfères pas voir ça. Dans tous les cas, c'est la merde, entre le débit carte de l'été et la (non)prévision du troisième tiers tu peux même pas occuper tes journées sur made.com pour réorganiser ta future vie. Ou alors tu peux remplir des paniers sur leur site, les laisser clamser dans un coin et ne pas les valider, tu verras ça marche. Tu te rends compte qu'une heure après tu sais même plus ce que t'avais mis dedans, c'est dire que c'était nécessaire.
Et enfin ton mec. Ahhhhh ton mec ! Ben lui aussi il est reparti. Au turbin, à la boxe, au marché, aux putes, là où ça l’amuse quoi, mais où il est très attendu. Pour sûr. Que toi, non, t’avais rien de prévu regarde, entre la scarlatine et le questionnement de fond spécial rentrée. Bon après, faudra m’expliquer comment tu te questionnes de fond avec Peppa Pig et le bip du lave-linge en fond sonore mais ça doit bien se faire.
Allez, la prochaine fois je vous raconterai comment faire durer son couple. Je suis sûre que je tiens deux, trois indices déjà.